9eme rencontre, KM 2.0 – Le management des connaissances deviendrait-il social?

Plus de 180 participants représentant près de 90 entreprises et institutions ont été accueillis dans les locaux de BNP PARIBAS, rue Bergère, le 24 octobre dernier pour cette 9ème Rencontre, sur le thème suivant:

« KM 2.0 – Le management des connaissance deviendrait-il social? »

Thierry VALDANT – Accueil

 

Bonjour à toutes et à tous.Je vous souhaite la bienvenue chez BNP Paribas au 14 rue Bergère. Pour la petite histoire, le 14 rue Bergère est l’ancien siège du Comptoir National d’Escompte de Paris (CNEP) qui a été créé en 1848 et qui a fusionné avec la Banque Nationale du Commerce et de l’Industrie (BNCI) en 1966 pour donner la Banque Nationale de Paris (BNP) et cet immeuble a été construit en 1878 et il a été rénové en 2009, d’où ces superbes locaux que vous avez pu voir en arrivant ici. Je vous souhaite une très belle rencontre sur le thème « Le management des connaissances »

Ziryeb MAROUF – Introduction
 

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Nous allons parler de management des connaissances, la question étant la suivante : le Knowledge management ne deviendrait-il pas social ? Cette socialisation concerne t’elle le management ou les connaissances elles-mêmes.La question n’est pas simple.Il est probable que le management prend de plus en plus en compte l’humain dans un certain nombre de domaines, et en particulier ceux de la transmission des connaissances et des méthodes à l’ère des « travailleurs du savoir ». En quoi les réseaux sociaux d’entreprise peuvent-ils contribuer à ces démarches de partage et de transmission ? C’est sous cet angle que nous avons préparé cette demi-journée. Diapo-ZMA-9eme-06Revenons sur cette problématique de « management des connaissances » en citant deux philosophes. Bertrand RUSSEL, d’abord : « les idiots sont sûrs d’avoir raison alors que les gens sensés sont pleins de doutes”; Alain ensuite « le doute est le sel de l’esprit « . Le piège à éviter consiste à ne pas confondre connaissances et certitudes. Deux paramètres, composent notre réflexion : Celle du temps d’abord.La connaissance ne peut être considérée comme « vérité » à l’instant « t », mais dans six mois, dans un an, dans cinq ans, à l’échelle du numérique, est-ce que ça aura toujours du sens ? Diapo-ZMA-9eme-07Celle du contexte, ensuite. Lorsque nous voyons cette carte, le planisphère vu d’Australie, il est aisé de comprendre que tout est question de point de vue. Un point d’observation différent, un contexte différent, une organisation du travail distincte, des enjeux, des objectifs différents, tout cela induit un point de vue et, assez naturellement, la notion de relativité des connaissances.  Diapo-ZMA-9eme-08Depuis de nombreuses années, les entreprises ont développé des bases de connaissances grâces aux solutions de Knowledge management. La démarche s’appuyait sur le postulat suivant : si nous prenions la donnée pour la numériser, nous allions transformer cette donnée en information, et si cette information était indexée, elle était rendue disponible via les systèmes de gestion électronique de documents, nous allions transformer cette information en savoir.Diapo-ZMA-9eme-09Or, ce n’est pas aussi simple. Pour le démontrer, admettons que nous nous intéressions justement à cette théorie de la relativité ! En utilisant notre moteur de recherche autour de cette thématique, nous trouverions très vite des documents indexés et accessibles et c’est là, que le bas blesse. Nous ne comprendrions pas grand-chose à nos lectures ! Ces documents PDF, PPT et autres procédures, pourtant bien indexés et disponibles, ne nous suffisent pas à transformer l’information en savoir ! Ne nous laissant pas décourager, nous nous renseignons alors au près de collègues.Diapo-ZMA-9eme-10Il semblerait qu’un certain Albert soit assez doué sur ces sujets. Nous pouvons l’identifier sur le réseau social, d’ailleurs, son profil enrichi encourage ceux qui le souhaitent de le solliciter au sujet de cette théorie qui le passionne. Il est certain que nous comprendrons bien plus de choses au sujet de la théorie de la relativité au contact d’Albert qu’en lisant la documentation spécialisée associée dans les bases documentaires.Diapo-ZMA-9eme-11C’est là que réside la démarche « sociale » associée au management de connaissances : c’est l’humain, finalement, qui transmet le mieux son savoir et son savoir-faire, et ce, pas exclusivement autour de théories pointues, mais autour de tout ce qui fait le quotidien de la culture d’entreprise, du patrimoine informationnel.Diapo-ZMA-9eme-02
Ce capital cognitif de l’entreprise prend de nouvelles dimensions en remettant l’humain au cœur du dispositif et notamment quand de nouvelles recrues arrivent et quand il s’agit de les intégrer dans de nouveaux services, de nouveaux métiers etc. Bien évidemment ce lien social est favorisé et démultiplié par le vecteur numérique et les réseaux sociaux d’entreprise en particulier.

Le « Knowledge Management » traduit en français donne « Management des Connaissances ». Le terme de connaissances, en langue française peut faire référence à la fois aux savoirs mais aussi aux personnes que je connais : un réseau de connaissances. De fait, la traduction inverse pourrait donner « Relationship Management ». Ne serait-ce finalement pas le vrai sujet de l’entreprise 2.0 ? Nous sommes rentré dans une nouvelle ère, l’ère des NTR – Nouvelles Technologies de la Relation – au sein de nos entreprises et de nos organisations. Cette ère devrait faire la part belle à l’intelligence Connective, celle de l’identification des sachants plutôt que des savoirs. Quant à l’intelligence collective, il faut toujours faire preuve de vigilance, la loi du nombre n’étant pas toujours la plus juste : quand l’intelligence collective croyait que la terre était plate, Galilée a failli aller au bûcher.

 

Pierre PREVEL – Retour d’expérience

 

 

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Nous allons essayer de faire un retour vers le futur, mais avant, on va faire un retour un peu différe

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Je suis un banquier de formation et j’aime bien les chiffres, alors je vais vous soumettre une énigme : 400.000, çà évoque quoi pour vous ? Ce n’est pas des euros ! Est-ce le budget de l’Observatoire ?

Diapo-PP-9eme-03C’est le début du management de la connaissance : la transmission d’un savoir-faire fondamental pour la survie de l’espèce humaine : c’est-à-dire comment on allume un feu. Selon les historiens : entre 400.000 années et un million d’années. C’est de l’apprentissage par imitation. L’apprentissage a commencé par le côté social. Il s’est poursuivi ensuite notamment au Moyen Âge avec les corporations (guildes) ou les apprentis apprenaient les fondamentaux des métiers en regardant un maître et en appliquant ce qu’il avait montré.Cela s’est poursuivi avec Diderot et d’Alembert : l’encyclopédie universelle qui contenait des tables de travail décrivant les principales activités et qui était en fait la première base de connaissances qui n’était pas relationnelle. C’est la première fois qu’on faisait une transmission de connaissances structurées qui ne soit pas accompagnée sur le terrain.Puis vient le compagnonnage (classé au Patrimoine Mondial par l’UNESCO)

Beaucoup plus récemment, on a vu d’autres formes de Knowledge management, notamment dans les années 80, où le marché mondial avait pour la première fois un excédent très important de l’offre sur la demande, et il fallait que toutes les entreprises trouvent un avantage comparatif stratégique. Et, là, ils ont investi dans la gestion de la connaissance parce que ça permettait d’innover, ça permettait de transmettre plus vite des compétences critiques dans les métiers, etc.Le problème, c’est qu’à l’époque on ne l’a pas fait de façon sociale, on l’a fait de façon documentaire.Diapo-PP-9eme-04Pendant toute cette époque-là, ça a été la création de la gestion électronique de documents (GED), des bases de connaissances, des intranets etc.Il y a eu toujours un peu de social, avec les communautés notamment, qui permettent de transmettre et de créer des savoirs entre praticiens ayant les mêmes problèmes, ou les mêmes goûts, les mêmes préoccupations.Le Knowledge management a été pendant toute une époque basée sur le document, et sur le stock de connaissances.

C’est ce que j’appelle le K. management « écureuil », c’est-à-dire qu’on ramasse des « noisettes de connaissances » un peu partout, on les stocke, et puis après on essaie de le retrouver et de les réutiliser.

Ce n’est pas toujours évident qu’on les retrouve, d’une part, et ce n’est pas toujours évident non plus que l’on puisse les réutiliser, notamment parce que la connaissance doit supporter le transfert dans le temps et dans l’espace…Dans le temps : c’est par exemple lorsque vous retrouvez un document technique des années 70, si vous n’avez pas le contexte, si vous n’avez pas les clés de lecture, c’est un peu comme tout à l’heure Ziryeb avec le tableau d’ Einstein, vous êtes un peu perplexes et même parfois franchement perdus.
Dans l’espace : dans les groupes où j’ai travaillé et où on a fait du Knowledge management entre les divers pays, on s’est aperçu que les connaissances n’étaient pas facilement transposables d’un pays vers l’autre parce que le contexte, la culture, la conjoncture, etc. sont différents.Ça veut dire qu’effectivement si on transmet la connaissance toute seule, sans son contexte social, sans son appui social, bien souvent on n’arrive pas à la partager.Diapo-PP-9eme-05

C’est pourquoi aujourd’hui, avec tous les moyens qu’on a, notamment les moyens Web 2.0, on souhaite associer à l’approche documentaire -qui reste indispensable pour un certain nombre de choses – une approche par les personnes, et donc par les conversations, par les liens faibles, par les liens d’opportunités etc. et en même temps s’attacher au flux de connaissances, car le flux de connaissances a ce gros avantage qu’il est émis en même temps qu’il est consommé et utilisé.Et effectivement on n’a pas de déperdition en ligne, comme quand on stocke des noisettes et que parfois on ne les retrouve pas. Je ne dis pas que le Knowledge management « écureuil-noisettes » soit mauvais, mais il n’est pas suffisant, Il ne peut pas être autonome.Aujourd’hui qu’est-ce qu’on fait ?

On fait toujours des répertoires de connaissances, c’est indispensable, ça permet de savoir où on en est, ça permet d’avoir un socle stable pour la culture d’entreprise, pour ses activités.

On va créer des connaissances, les trier, les repérer, les acquérir, y compris à l’extérieur avec la notion d’entreprise élargie, où vous avez les fournisseurs, les écoles, les universités etc. qui vont permettre de co-créer ou d’apporter des connaissances.

On peut retrouver des connaissances, et les moteurs de recherche sont extrêmement précieux, quoique parfois insuffisants.Et puis on va réutiliser, parce que c’est bien le propos, c’est de dire : on doit pouvoir utiliser la bonne connaissance, au bon moment, pour la bonne chose.Tout à l’heure dans les exemples, Martin nous parlera de réutilisation de connaissances sur des sujets miniers, car on ne peut pas réinventer des connaissances mises en place il y a 50 ans par des gens qui ne sont plus dans l’entreprise.

On valorise aussi la connaissance, on la modélise, on la documente, et on la contextualise. Par exemple dans un projet, ce qui est intéressant – au-delà de décrire le projet lui-même – c’est de dire quel était le contexte, qu’est ce qu’on voulait faire, les objectifs, qui était dans ce projet, qu’est-ce qu’on a vraiment fait, qu’est-ce qu’on a dû adapter, et puis si on doit refaire un jour, qu’est-ce qu’on changera ? Et çà, c’est une véritable transmission de connaissances.

On utilise aussi beaucoup les communautés apprenantes.

Nous en parlerons dans la table ronde, il y a énormément de communautés professionnelles qui sont des lieux de transmission de savoir tout à fait efficaces.

Et puis on capitalise, et dans la capitalisation il s’agit à la fois d’actualiser, de conserver, d’indexer etc. et de faire ce qu’on appelle la curation. Ces flux qui sont été nés dans une communauté apprenante (et dans celles-ci j’inclus les réseaux sociaux : c’est un espace humain), tout ce qui se dit, s’échange, les conversations, etc. c’est du court terme.Si on arrive à en capturer un petit peu et à le mettre dans le stock de façon raisonnée, on va sauvegarder une partie de ce savoir, et seulement la partie qui est utile à transformer. Il ne s’agit pas de stocker des choses qui sont purement conjoncturelles par exemple

Qu’est-ce qu’on gère comme problématiques d’entreprise aujourd’hui grâce aux techniques du Knowledge management ?Essentiellement des problématiques de terrain, comme par exemple accélérer la mise en marché d’un nouveau produit (Éric nous en parlera tout à l’heure). Il y a des moyens extrêmement puissants d’inciter le terrain à aider le terrain, pour réussir ce genre de choses.Innover de façon participative : aujourd’hui l’innovation, c’est un sujet majeur pour beaucoup d’entreprises et il y a plusieurs sujets d’innovation.

Le premier sujet c’est l’innovation produit qui est bien connue. Il y a aussi l’innovation usages : quels nouveaux usages de nos produits pourraient faire nos clients ? Et l’innovation client, quels nouveaux clients pourraient être intéressés par les usages de nos produits existants ?

Et puis l’innovation incrémentale, l’innovation des processus : les gens du terrain savent très bien où ça coince dans les processus de production, de distribution, de commercialisation etc. On peut, avec des moyens participatifs, contribuer à fluidifier les processus notamment ceux du dernier kilomètre vers le client

Quelles problématiques d’entreprise

  • Fluidifier et accélérer la mise en marché d’un nouveau produit / service
  • Innover de façon participative (nouveaux produits,
  • usages, clientèles et amélioration continue des processus)
  • Concevoir et déployer efficacement un nouveau système d’information
  • Contribuer à l’intégration des nouveaux entrants et des filiales récemment acquises
  • Définir de façon collégiale des éléments d’une politique d’entreprise ou d’un plan stratégique, en demandant leur avis aux cadres, à certains collaborateurs, ce qui accroit leur engagement, leur adhésion

Diapo-PP-9eme-07Tout à l’heure, comme le disait Ziryeb, nous allons avoir nos amis qui vont nous apporter leur témoignage

Qu’allons nous faire ensemble ?…. Du Knowledge Management :Nous allons échanger des retours d’expériences, des idées, dialoguer …Diapo-PP-9eme-08

 

Pour conclure, et en parodiant Obama : « Yes, we can » !

OUI, le Knowledge management peut apporter beaucoup de choses à l’entreprise à condition de l’approcher comme un projet d’entreprise.

 

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TABLE RONDE

avec :

Florence CARIOU – GDF SUEZ, Judith WILL – BNP PARIS CARDIF, Eric LAURENT – LA POSTE et Martin ROULLEAUX DUGAGE – AREVA

 






LE GRAND TEMOIN

Nous accueillons le grand témoin Nathalie « DUPUIS-HEPNER », passeur de connaissances.

Du lien social à l’innovation sociale par le management des connaissances

Nathalie va nous expliquer les pratiques qu’elle a développées dans le monde de l’entreprise, et puis ce qu’elle souhaite en faire aujourd’hui dans le monde de l’économie sociale et solidaire.

Je suis ravie d’être avec vous pour pouvoir partager un parcours un peu particulier qui est un parcours en quatre aventures, la dernière celle qui a commencé il y a un peu plus d’un an et celle qui m’a amené à m’ouvrir la le monde de l’économie sociale et solidaire.

En quelques mots pour vous expliquer ce parcours, j’ai démarré ma carrière comme professeur, j’étais dans l’enseignement professeur de droit à l’école HEC pendant cinq ans. J’ai continué ma carrière en entreprise où j’ai créé un département de droit financier à la direction juridique de l’entreprise Rhône-Poulenc, belle multinationale française multisecteur, j’ai ensuite rejoint le cabinet Ernst & Young ou je me suis occupée pendant 15 ans du Knowledge management dans un rôle de Chief Officer, d’abord le cabinet d’avocats donc le métier juridique, puis la fonction de Knowledge management pour l’ensemble du cabinet Ernst & Young et au niveau international. J’ai terminé cette partie de mon parcours il y a un peu plus d’un an avec le désir très fort de transposer ce qui a été ses 30 ans d’expérience dans des environnements variés avec un fil conducteur qui m’est apparu de manière limpide qui est celui de la transmission et du partage des connaissances : je travaille depuis plus d’un an au sens de passeurs à la transposition de mon expérience et de tout ce que le métier de management des connaissances comporte. C’est ce parcours que je voudrais partager brièvement avec vous, en éclairage, en vous disant simplement c’est une évidence que depuis l’origine ma vision du management des connaissances est effectivement un travail en profondeur sur l’émergence et l’enrichissement de l’intelligence collective, mais c’est aussi par nature c’est indissociable de cette démarche, la création de ce lien social qui peut s’exprimer sous des formes extrêmement variées.

J’ai choisi quatre éclairages correspondants à ces quatre étapes de cheminement, pour exprimer avec vous ce lien social tel que je l’ai vécu pendant toutes ces années.

Un métier d’enseignement tel que celui que j’ai exercé dans une grande école dans un département pluridisciplinaire et même un département au sein du corps professoral de HEC c’est un rôle de catalyseur et créateur de ce lien social multi facettes. On travaille sur la théorie est à la fois sur les méthodes et sur des cas concrets,  on est bien sûr cette idée de partager, et le lien social existe dans toutes les dimensions, dans la relation avec les étudiants, mais j’ai commencé mon chemin dans la réflexion sur le Knowledge management et les richesses de la combinaison des savoirs pluridisciplinaires en travaillant personnellement sur une matière particulière qui était à l’époque le droit des sociétés qui est l’un des aspects particuliers, mais que je ne pouvais pas faire évoluer, que je ne pouvais pas enrichir si je n’étais pas en combinaison permanente et en co-création permanente de connaissances avec les collègues de mon propre département, et bien évidemment au-delà du département droit, des départements de stratégies de marketing, de finances, on travaillait donc sur un certain nombre de projets et d’initiatives pluridisciplinaires, et avec les entreprises puisqu’en fait à l’occasion de mon travail, je travaillais également en formation professionnelle donc en liaison avec des entreprises, et je travaillais avec les entreprises qui permettaient de bâtir des cas concrets. On était donc en permanence en co-construction de savoir qui étaient des savoirs combinés autour d’une même matière qui était le droit, représentant les porteurs de regards croisés et complémentaires.

C’était le démarrage de ma prise de conscience de ce lien social dans la construction des savoirs pluridisciplinaires.

C’est devenu encore plus évident pour moi, et cette fois-ci en mode plus opérationnel, deuxième étape, quand j’ai rejoint la direction juridique de Rhône-Poulenc, puisque le compte tenu de mon passé dans le monde de l’éducation, on m’a confié la mission et le rôle d’organiser la filière des juristes de ce groupe international, qui prenez conscience qu’il avait une force extraordinaire qui était l’ensemble des juristes répartis dans le monde entier, qui représentait environ 130 personnes, chacun travaillant dans un domaine juridique différent, dans des secteurs différentes, la chimie, la santé, l’agrochimie, et en fait ces juristes étaient posées les uns à côté des autres sans aucun lien à l’époque, et compte tenu de mon passé le directeur juridique m’avait proposé de m’occuper de cette filière, ce qui dans son esprit au départ voulait dire surtout créer un événement annuel de rencontre et proposer des séminaires de formation, avec une dimension très traditionnelle, j’avais probablement déjà sans le savoir la notion de management des connaissances, et j’avais réalisé que le travail méthodologique de ces juristes était tellement fragmenté, que cet étalement des experts qui n’avaient pas l’habitude de travailler ensemble, qu’on arrivait à des modes de fonctionnement qui m’avaient semblé très vite assez peu compatibles avec la pression du temps et de l’efficacité que l’on nous demandait au quotidien.

Et donc avait germé en moi à ce moment, sans aucune aide de l’extérieur, je pense que c’était du pur bon sens, l’idée d’organiser au-delà de simples séminaires de rencontre, de commencer à réfléchir sur ce qu’étaient ces savoirs partagés et partageables de ces juristes qui intervenaient chacun à trois mois d’intervalle dans le même pays par exemple pour créer une filiale ou pour créer une joint-venture avec un partenaire, et qu’il ne se parlaient jamais. Ce sont des exemples extrêmement  concrets où les juristes qui rédigeaient les mêmes contrats pour des opérationnelles sur des sujets thématiques qui étaient en fait les mêmes, et qui -chimie ou agro- travaillaient sur les mêmes thèmes juridiques, et même recherche juridiques, ne se posaient jamais la question s’il y avait déjà un partage possible dans les modes opératoires au-delà simplement des partages en réunion une fois par mois pour parler de l’actualité des uns et des autres.

J’ai en fait démarré mon métier de Knowledge management sans le savoir pendant cette période-là parce que je n’en avais absolument pas le titre bien sûr, j’étais juriste opérationnel, mais pour moi c’est allé plus loin que ça c’est-à-dire que au-delà de ce que je créai avec ces juristes avec notre communauté de pratique qui elle-même s’organisait en sous-communauté avec des critères différents, je me suis retrouvée aussi à prendre conscience que cette connaissance de nos métiers qui s’appliquait dans un monde opérationnel et un monde multifonctionnel ne pouvait pas simplement s’organiser à la frontière de notre communauté.

On travaillait sur des sujets tellement complexes en entreprise pour accompagner les opérationnels multi métiers et qu’on travaillait en permanence avec les fiscalistes, les financiers, les responsables communication, etc. et donc, assez rapidement, j’ai posé les jalons de ce qui allait devenir mon mode d’organisation dans ma troisième vie, qui était l’idée d’organiser ces comités internes fonctionnels des gens qui travaillaient ensemble sur des mêmes sujets, partager finalement, élaborer des corpus de connaissances communs intra fonctionnels.

Tout ça pour vous dire que cet exercice d’agrégateur, de coordinateur d’intégrateur de connaissances reconstruites en mode pluridisciplinaire, sans que je le réalise pendant toutes ces années, pendant huit ans, ont formé pour moi la trame de ce qui allait devenir mon troisième métier, la troisième dimension, ce métier de directeur du management des connaissances dans un cabinet international qui représente en quelques chiffres 140 000 personnes, 140 pays, et une centaine de communautés de pratique pas forcément structurées comme telles d’ailleurs, mais de communautés de pratique ou communautés de connaissances thématiques, qu’elles soient sur des sujets d’expertise technique, ou qu’elles soient des communautés sectorielles.

Ce qui est très intéressant dans un cabinet de conseil comme celui-là, c’est qu’en fait vous avez en permanence des corpus de connaissances qui se créent et qui s’enrichissent, et qui sont à la jonction de la connaissance métier des auditeurs, des financiers, des fiscalistes, des juristes, traversé en permanence d’une connaissance sectorielle d’application de ces métiers, de ses expertises, qui pour la banque, qui pour l’automobile qui pour la chimie etc. et l’enjeu pour un cabinet comme celui-là c’est bien évidemment d’organiser tous les circuits de connaissances dans toutes leurs dimensions, qu’elle soit dimension technique, sectorielle, et également fonctionnelle, notamment sur les thèmes de marketing et buisness développement.

Forte de mon expérience passée, j’ai organisé progressivement ce métier et les équipes qui s’en occupaient autour de trois thèmes qui étaient en fait une réflexion sur l’information, information entrante dans un groupe comme celui-là qui fait parti du corpus de connaissance particulier, puisque c’est celui dont on se nourrit, mais qu’on utilise ensuite pour construire des connaissances collectives, ensuite on a travaillé sur ce corpus de connaissances intermédiaires de buisness intelligence, qui est en fait la connaissance des marchés clés, des sujets qui sont des « hot topics », et la connaissance des secteurs de nos clients, la connaissance de nos clients eux-mêmes, et la connaissance de la concurrence.

Vous avez la troisième dimension qui était au coeur de la machine de gestion des connaissances, où justement les communautés de pratiques jouent un rôle très important, qui sont en fait toutes ces connaissances qui sont développées par les consultants qui vivent à l’extérieur en relation avec leurs clients, qui sont sollicités par leurs clients, qui font des appels d’offres, qui, à partir de ses réponses aux appels d’offres, gagnent des missions, et à partir de ces missions vont déployer leur expertise de conseil chez le client avec tout ce que ça comporte comme enrichissement de connaissances en permanence à la fois pour eux bien sûrs, mais collectivement pour l’ensemble du cabinet.

Donc ce métier était organisé autour de ces trois thèmes, et on y travaillait avec une dimension multiple, multi-métier en permanence, et ce lien social, ce rôle que je retrouvais cette fois-ci en grandeur nature, je me suis retrouvée avec une situation où l’organisation de ce métier de manager de la connaissance, avec la structuration des communautés de pratiques qui travaillaient sur ces sujets en permanence, tout cela m’a amené à organiser toute notre réflexion et notre action autour du thème intra fonctionnel c’est-à-dire les communautés de pratique des métiers du management de la connaissance qui existaient dans l’ensemble des pays, qui travaillaient avec l’ensemble de nos métiers, et qui étaient elles-mêmes ces communautés de pratique, il y avait également… on retrouvait pour moi cet enjeu très important de liens internes fonctionnels qui n’était pas imaginable de travailler sur le management des connaissances sans embarquer avec une nous la direction des systèmes d’information, la direction des ressources humaines qui jouent un rôle-clé pendant toutes ces années, la direction du marketing, du bizness développement, élément majeur de la direction du management des connaissances, donc un réseau très structuré de relations et d’échange et d’expérimentation en inter-fonctionnel entre le management des connaissances et les autres fonctions.

Et bien sûr la dernière dimension, celle qui a le plus de liens avec les communautés de pratique dont vous avez parlé jusque-là, c’est la relation avec les métiers opérationnels, un peu comme une petite entreprise dont le cœur de métier était la chaîne de valeurs en fête des connaissances, qui démarrait à la matière première c’est-à-dire la source d’information, qui élaborai les produits semi-finis d’intelligence, mis à disposition de nos consultants, et puis les consultants internes travaillaient pour créer un environnement favorable au partage des connaissances, qui, là,  étaient des connaissances élaborées.

Et donc l’organisation pour les métiers de la relation avec la direction du Knowledge management était très importante car elle passait par un réseau très actif de Knowledge managers, car il ne pouvait y avoir de management des connaissances sans qu’il y ait un rôle très actif de co-développement avec les métiers pour lesquels on travaillait, et donc nous avions un réseau de Knowledge managers dans chacune des communautés de pratique, à la fois dans les pays et à l’intérieur des pays dans les différents départements et les services techniques, mais également avec des réseaux informels qui s’étaient organisés sur la connaissance sectorielle, et tout ça faisait un maillage de Knowledge managers, une centaine, qui était animés par une équipe de collaborateurs qui travaillaient avec moi à la direction de Knowledge management, et qui était en fait des animateurs de ces communautés relayés par des Knowledge managers dans chacune des lignes de services et sous-lignes de services.

Ce qui était très intéressant pour nous c’était de les animer à la fois de manière verticale, à l’intérieur du métier de l’audit, ou du métier de la fiscalité, du métier de conseil, on avait une ligne de Knowledge managers qui travaillaient avec nous, mais on organisait aussi régulièrement des discussions et des échanges, en inter métier, c’est-à-dire que les Knowledge managers de l’audit travaillaient aussi avec les Knowledge manager du juridique, du fiscal, du conseil etc.

Donc on a en permanence travaillé sur cette construction et ses regards croisés et finalement cet enrichissement dans toutes les dimensions de l’organisation. Et on vivait la même chose au niveau des sponsors de la fonction. Les sponsors de la fonction étaient pour chacun des métiers un responsable qui avait été nommé, et côté métier mon alter ego était la personne avec laquelle on définissait la stratégie, les règles d’organisation, avec lesquels on travaillait pour que les Knowledge managers qui étaient finalement les animateurs de ces communautés de pratique, et un profil de rôle qui soit reconnu par l’organisation pour qu’ils aient des objectifs de Knowledge managers qui soit fixé chaque année au moment où on fixait les objectifs opérationnels. Il y avait un moment réservé à la fixation de leurs objectifs multifonctionnels dans le cadre du Knowledge management, et on avait également bâti des grilles qui nous permettaient de suivre l’activité de ces Knowledge managers, et s’assurer à la fin de l’exercice qu’on avait des indicateurs qui nous donnaient en tout cas une idée de ce qu’avait été l’avancement de leur projet, et qui nous permettaient aussi d’intervenir dans l’évaluation du Knowledge managers dans son rôle.

On a réussi à faire cela car on a construit la fonction dès le départ avec la direction des ressources humaines. On avait pris conscience qu’on n’y arriverait pas si le rôle fonctionnel qu’il était indispensable de donner à des consultants qui étaient par ailleurs des consultants opérationnels, qui n’était pas reconnu par leur hiérarchie, ni par leur pairs, il fallait qu’il puisse s’appuyer sur quelque chose de très concret qui les distingue du reste de la communauté, et que cette reconnaissance soit actée tous les ans au moment des évaluations de la performance de chacun.

Voilà rapidement brossé la manière dont j’ai construit sur les expériences précédentes quelque chose de structuré. On avait un rôle à jouer, et une équipe qui nous permettait de nous organiser.

À partir de là, en passeur de connaissances, comment tout cela peut-il prendre format dans ce monde de l’économie sociale et solidaire ? Je ne vais pas trop rentrer dans le détail de ce monde que vous connaissez partiellement probablement, monde complexe, qui a à la fois comme vocation l’intérêt général et la résolution à travers d’un certain nombre d’acteurs, de besoins sociaux, qui représente en France environ 2 millions de personnes, salariés de l’économie solidaire, que certains appellent l’économie positive ou l’économie solidaire et durable, peu importe le nom qu’on lui donne, sa particularité c’est d’être l’économie qui remet l’homme et les besoins sociaux au cœur de l’activité économique concernée.

Quand on parle de l’économie sociale et solidaire, ce qui est frappant, c’est qu’on retrouve cette très grande complexité dans un monde ou les enjeux sont majeurs, mais où tout est très fragmenté, et où chacun travaille en silos, avec des méthodes de travail assez flexibles, dans un certain nombre d’organisations, dans lesquels on trouve à la fois des salariés internes, et au bout du compte des usagers des prestations qui sont apportées par les associations ou des fondations ou des coopératives, mais aussi une autre catégorie d’acteurs au rôle essentiel, les bénévoles, ce qui crée une grande complexité d’organisation de fonctionnement, et une très grande richesse en termes de connaissances et d’expérience accumulée par des acteurs très différents et leur manière de travailler aussi.

Ces acteurs de l’économie sociale et solidaire ce sont des associations, des fondations, des coopératives, des mutuelles, mais aussi des centres de ressources, des structures comme la  « Vis », le laboratoire de l’économie sociale et solidaire, des structures qui sont des structures transversales et qui travaillent au contact des acteurs de l’économie sociale et solidaire. Tous ces acteurs sont organisés  eux-mêmes en réseaux. Il y a un rôle de lobbyings et d’organisation du fonctionnement des associations, vous avez des réseaux de coopératives, vous avez en fait un empilement de structures permanentes. Les acteurs eux-mêmes, les fédérations sectorielles auxquels ils appartiennent, par exemple toutes les associations qui interviennent dans le domaine de la santé ou du social et sanitaire, toutes ces associations sont affiliées à un réseau d’associations qui travaillent dans le domaine, de façon analogue aux fédérations professionnelles ou aux syndicats professionnels que l’on connaît.

Et puis vous avez ces structures nationales qui, elles, sont organisées pour créer de la dynamique, quel que soit le domaine de d’intervention des filières et des associations. Vous avez donc un enchevêtrement d’acteurs qui sont soit des acteurs opérationnels soit des acteurs de ressources soient des acteurs fédérateurs qui doivent traiter de la coordination, et avec un enjeu absolument majeur aujourd’hui de circulation de l’information, de création de connaissances qui ont lieu absolument partout avec la particularité que les actions qui sont menées dans le domaine de l’économie sociale et solidaire -l’innovation sociale- sont des actions très fragmentées de très grande proximité. Et donc une solution innovante qui va être développée localement dans un territoire parce qu’une association dans lequel il y a 10 personnes travaillent au contact d’entrepreneurs sur ce même territoire où travaille au contact des collectivités territoriales, tombe des élus locaux de ce territoire, et ensemble ils vont trouver des solutions pour peut-être régler un problème local dont les bénéficiaires vont paraître 200 ou 300 personnes autour d’eux, mais cette solution innovante qui est développée localement par cette association en fait l’enjeu majeur aujourd’hui c’est se demander comment avec tous les circuits existants elle va pouvoir être repérée, analysée, modélisée, avec un objectif majeur qui est de celui d’un essaimage accéléré pour que des solutions innovantes qui sont développées sur le territoire par exemple dans le domaine de l’insertion, mettant en place des solutions de contournement et des méthodes nouvelles, comment cela pourrait profiter aux mêmes associations mais dans des villes, des lieux différents.

Par la structure même de l’économie sociale et solidaire, on a un enjeu absolument phénoménal d’identification des connaissances qui sont des connaissances à forte valeur ajoutée puisqu’elles sont porteuses d’innovation sociale et de repérage de captation de réflexion d’analyse de modélisation et surtout de diffusion est bien sûre après boucle d’enrichissement continu.

Alors à ça vous ajoutez un phénomène qui est passionnant en ce moment et qui vous intéresse tous en tant que représentants des entreprises, qui fait que au-delà des relations traditionnelles entre les acteurs de l’économie sociale et solidaire et le tissu social, il y a aussi des alliances qui sont en train d’apparaître, compte tenu de la complexité des enjeux et compte tenu de la prise de conscience de bon nombre d’entreprises de leur rôle en tant que citoyen -vous êtes tous bien sûrs sensibilisés aux questions de responsabilité sociale des entreprises, c’est le même sigle que les réseaux sociaux d’entreprise, on utilise le mot RSE aussi, ça ne vous a pas échappé, donc la responsabilité sociale de l’entreprise c’est la prise de conscience que l’entreprise a non seulement son empreinte économique et ses intérêts économiques à faire développer, mais la prise de conscience qu’à côté de cette empreinte économique il y a aussi une empreinte sociale et une empreinte environnementale.

Les entreprises ne font pas ce cheminement au même rythme, le degré de maturité n’est pas le même de l’entreprise à l’autre, mais en tout cas un certain nombre d’acteurs commencent à se mobiliser sur des projets qui vont au-delà des projets de RSE traditionnels et qui sont véritablement la réflexion sur de nouveaux partenariats et de nouvelles alliances qu’on appelle des alliances hybrides, qui fait que certains acteurs commencent à travailler avec les acteurs de l’économie sociale pour, ensemble, faire avancer des vrais besoins sociaux et trouver des solutions innovantes.

Il y a des exemples pour vous illustrer : il y a aujourd’hui par exemple un partenariat dont on commence a beaucoup parlé, c’est celui de Renault et d’une association qui s’appelle voiture Inde Co, et ce partenariat s’appelle « mobiliz », il a la particularité d’être né d’un constat que l’association elle-même avait fait depuis longtemps, c’est que le problème de la mobilité aujourd’hui sur les territoires, le problème de l’accès à la voiture, peut-être un véritable frein à l’emploi, et dans une période où le feu des projecteurs et sur des questions justement d’emploi, de réinsertion par l’emploi, et de lutte contre le chômage bien sûr, il fallait trouver des solutions innovantes en tant qu’association pour accompagner des personnes en difficulté qui avait besoin de mobilité. Et ce qui est passionnant, c’est que de ce projet qui est un projet d’association est né un partenariat avec Renault qui, en tant qu’entreprise, non seulement pour elle mais aussi pour l’ensemble de la sphère qui gravite autour d’elle, cette entreprise a passé un partenariat pour apporter tout le réseau de Renault pour faire est amplifiée des actions qui étaient menées par voiture and Co. dans le domaine de la mobilité pour des demandeurs d’emploi. C’est un exemple, il y en a d’autres.

Il y a par exemple le partenariat en cours entre Blédina et la Croix-Rouge, avec une intervention des pouvoirs publics et qui est importante. Ce qui est intéressant dans ces nouvelles alliances, c’est que non seulement des savoirs sont en train de se construire entre les acteurs de l’économie sociale et les entreprises, mais les pouvoirs publics sont partie prenante, et souvent les organismes de formation. Donc on a cette très grande complexité de rencontre de savoirs qui sont des savoirs très différents, qui se mobilisent et qui s’organisent pour produire des solutions nouvelles, et en fait dans cette nouvelle organisation sont en train d’émerger de nouveaux savoirs qui eux, ne ressemblent à rien de connu. Si on y travaille, si on les repère, si on les modélise, et qu’on arrive à les diffuser, permettre de démultiplier des effets sociaux qui sont extrêmement importants.

Dans ce partenariat entre Blédina et Croix-Rouge les pouvoirs publics sont impliqués et en fait ce partenariat qui s’appelle le programme « malin » est né de l’idée qu’il fallait repenser l’aide alimentaire, et qu’à l’occasion de la distribution d’aide alimentaire, il y avait aussi des enjeux de santé publique extrêmement important, et qu’il était possible de repenser l’aide alimentaire tout en réfléchissant à une alimentation en produits frais équilibrés.

Si tout à coup la conjonction et la création d’une intelligence politique d’acteurs totalement différents qui se mettent ensemble, qui se mobilisent pour atteindre des objectifs sociaux qui peuvent être même à plusieurs étages.

À partir de là, ce qui m’anime aujourd’hui, c’est ce travail que je fais avec un certain nombre d’acteurs dans le domaine de l’économie sociale et solidaire, et également que je commence à aborder avec des entreprises, également avec ce que j’appelle les entrepreneurs sociaux qui sont ces entrepreneurs d’un genre un peu nouveau qui sont bien des entrepreneurs au sens traditionnel mais qui ont pour vocation de développer des activités d’entreprise sur des thèmes qui sont des thèmes d’éducation, de santé etc. et en fait mon projet aujourd’hui qui est plutôt multiforme en fonction des rencontres que je fais, c’est justement de me dire qu’il y a moyen de travailler à plusieurs étages, soit de travailler en direct avec des acteurs opérationnels du monde de l’économie sociale et solidaire qui prenne ntconscience que leurs méthodes de travail aujourd’hui et que les connaissances qu’elles ont ne sont absolument pas organisées et à l’occasion de moments importants qui peuvent être des moments stratégiques, la j’ai eu l’occasion d’échanger avec une association qui a changé de statut juridique et qui a tout à coup des projets stratégiques extrêmement ambitieux, prend conscience que son organisation et les connaissances qu’elle a acquises pendant 20 ans ou 30 ans ou même 40 ans ne sont plus complètement adaptés au changement stratégique qu’elle est en train de vivre, et compte tenu des enjeux financiers, notamment pour continuer à capter des ressources, il est essentiel pour cette structure qui en a conscience que soit mis en place une démarche qui va permettre d’identifier les savoirs qui sont dans cette organisation, ce qui sont des savoirs durables mais qu’on va avoir besoin de réorganiser, mais ceux qui sont des savoirs émergeant à l’occasion de cette rupture stratégique un peu ambitieuse, et qui va permettre rapidement d’identifier des changements de modes de travail à l’intérieur de la structure, éventuellement d’identifier de nouvelles compétences dont on a besoin pour faire face aux objectifs.

Il y a moyen de travailler avec des acteurs d’une certaine taille cela ne peut pas être des associations de cinq personnes, mais il faut que ce soit des acteurs d’une certaine taille : de gros ses associations ou de grosses fondations.

Je prendrai un autre exemple d’une grosse fondation qui est elle-même dans un rôle de coordination, d’animation de réseaux d’entreprise sur les territoires, et qui aujourd’hui se pose cette question, qui anime un réseau de plusieurs milliers d’entreprises, qui elle-même son des animateurs sur les territoires d’actions dans le domaine de la lutte contre l’exclusion de la lutte contre les discriminations, de la lutte contre la pauvreté, qui en tant qu’entreprise, mène des actions qui sont organisées en réseaux locaux dans tous les territoires, environ une soixantaine d’agences sont des organisations spontanées d’entreprise qui ont envie de mener des actions citoyennes, et vous vous retrouvez en termes de gestion de connaissances devant une structure qui elle-même à des connaissances en tant qu’association, qu’elle n’a pas capitaliser, qui anime un réseau d’entreprise organisé finalement en communauté de pratique, ces clubs territoriaux sont des communautés de pratique, et ses communautés de pratique aujourd’hui ne sont absolument pas dans une démarche de capitalisation de connaissances. Donc les clubs entre eux, d’un territoire à l’autre, ne se parlent pas, les entreprises bien sûres qui agissent localement et qui sont à l’intérieur de cette communauté de pratiques virtuelles construisent au quotidien une richesse opérationnelle d’action sociale extrêmement intéressante, et à aucun moment il y a un arrêt sur image de ses communautés de pratiques virtuelles qui permettraient d’identifier les leçons de l’expérience, les solutions innovantes, les bonnes pratiques, et de les faire remonter au niveau de l’association et vérifier que ces bonnes pratiques circulent de manière évidente, pleine de bon sens, d’un club à l’autre.

Aujourd’hui avec l’accélération de ces besoins sociaux, la prise de conscience d’acteurs clés, de l’économie sociale traditionnelle, et en plus ses rencontres avec les entreprises, on est à un moment-clé d’une bascule possible, ou en tout cas d’une transposition possible, de tout ce qu’on a pratiqué ou que l’on pratique les uns et les autres dans nos entreprises, au service de cette économie qui est une économie différente, et au bout du compte au service d’une innovation sociale amplifiée et démultipliée.

Question dans la salle

Vous avez dit que c’était le moment opportun pour faire émerger de nouvelles pratiques en termes de management des connaissances dans ce monde qui, pour l’instant, pratique peu : quels sont les leviers, qu’est-ce qui inciterait à faire aujourd’hui, car le monde de l’entreprise n’est pas tout à fait le même…

La pression de l’urgence et la pression de la crise en fait. C’est un monde qui aujourd’hui très éloignés à quelques exceptions près, il y a quelques organisations, l’entreprise comme la Croix-Rouge par exemple a pris conscience de cette notion de Knowledge management, compte tenu de sa structure et de ses activités.

De même comme une structure comme handicap International, qui a un rôle interne de Knowledge manager. Il y a donc des structures qui en ont pris conscience, et il y a d’autres structures qui le savent depuis longtemps, ce sont les structures que j’ai appelé centre de ressources puisque elle leur vocation, c’est déjà depuis quelques années d’aller chercher des bonnes pratiques sur certains thèmes et les remettre à disposition de l’ensemble des acteurs.

Là où on a besoin d’accélération, le levier dont je me rends compte aujourd’hui, il y a une démultiplication qui n’échappe à personne des besoins sociaux, il y a un désengagement de l’État sur un certain nombre de sujets, faute de ressources, les volumes de distribution des subventions, l’appel au public-vous avez dû entendre ce matin aux infos, repris en boucle partout, que dans la situation de crise dans laquelle on est aujourd’hui, les dons aux associations ont baissé-vous avez donc une baisse de ressources de tous les côtés, vous avez des financeurs qui sont de plus en plus demandeurs de ce qu’on appelle « la mesure de l’impact social », qui ne donneront leur financement que pour autant que les structures puissent effectivement justifier de l’impact, en tout cas rentrent dans une démarche du fait qu’on ne se contente plus de prendre des subventions, mais on s’organise en interne pour travailler sur l’observation des effets directs et indirects de nos actions et que l’on justifie finalement de notre raison d’être de la structure au travers de cette mesure d’impact.

Vous avez aussi, par le biais des entreprises, des entreprises qui prennent conscience de cette triple empreinte et vont aussi venir bousculer les associations sur leur secteur traditionnel.

En observant ce contexte qui s’est modifié, il y a tout à coup une convergence et on peut, en analysant ces éléments de convergence, identifier les bons leviers.

Quand vous commencez à parler d’efficacité opérationnelle à l’intérieur d’une structure qui traditionnellement est totalement désorganisée pour ne pas dire chaotique, et que l’un des enjeux pour une association est d’aller chercher dans les meilleures conditions possibles des ressources raréfiées, le langage tout à coup n’est plus le même et la prise de conscience n’est plus la même. La réceptivité n’est plus la même.