Monde digital et diversité : les paradoxes

Question à Laurent DEPOND, Directeur de la Diversité du Groupe ORANGE :

Monde digital et diversité sont-ils compatibles?

© Ralitza Photography 2014

L’absence de « diversité » d’acteurs emblématiques du monde digital que sont Google, Facebook, Yahoo et autres LinkedIn a ému récemment les tenants d’une ligne du politiquement correct. Cette ligne voudrait que, pour certaines catégories de populations, une entreprise soit « comptablement » représentative de son écosystème. Les entreprises du monde digital sont, en particulier, épinglées pour la représentation insuffisante dans leurs effectifs des femmes et des « non blancs-non asiatiques », ce qui présupposerait qu’il y règne un climat de discrimination. Le phénomène, encore plus accentué en haut de la pyramide, tendrait à le confirmer.
L’accusation ne tient néanmoins pas compte du fait que les cursus qui sont les principales sources de recrutements de ces entreprises connaissent le même niveau de sous-féminisation et d’absence de représentativité de certaines des origines constituant la population des Etats-Unis. Malgré l’absence de comptage ethnique en Europe, la situation y est visiblement similaire.


Cette approche comptable de la diversité est aujourd’hui considérée comme réductrice car elle se focalise sur les caractéristiques visibles des individus que sont le sexe ou l’origine et omet toutes les autres. De plus, elle donne à l’engagement pour la diversité une motivation qui serait uniquement liée à une obligation « morale » et méconnaissent l’impact positif sur la performance des organisations que peut avoir une diversité bien gérée et appréhendée positivement. De nombreuses études récentes ont pourtant permis d’identifier des leviers de performance apportés par la diversité fonctionnelle des équipes. Par diversité « fonctionnelle » il faut entendre diversité des modes de réflexion par opposition à la diversité « structurelle », celle de la catégorisation évoquée précédemment. La diversité fonctionnelle se construit sur les parcours de vie différents ou l’immersion dans des cultures différentes. La diversité structurelle n’étant qu’un moyen d’atteindre une diversité fonctionnelle génératrice de performance. Ce qui caractérise des équipes fonctionnellement diverses c’est leur plus grande capacité d’innovation, leur prise de décision éclairée et une meilleure gestion du risque. Elles ne peuvent cependant fonctionner efficacement que dans un climat propice. En effet, l’important pour une organisation n’est pas seulement d’être « diversifiée » mais surtout d’être « inclusive » pour toutes et tous afin que chaque individu puisse s’épanouir dans son collectif de travail et contribuer à la performance globale. Celles qui l’ont compris constatent la création d’une image externe positive vis-à-vis de toutes leurs parties prenantes, un climat social plus serein, la réduction des risques psycho sociaux et, par dessus tout, l’accroissement de l’engagement de leurs salariés, facteur de performance primordial.
Dans cette logique, Orange a construit une vision de la diversité qui associe performance sociale et performance économique pour devenir un opérateur digital et inclusif.
Afin de faire émerger ce climat d’inclusion et favoriser la diversité des équipes au service de sa performance, Orange agit sur trois dimensions prioritaires :
– la diversification de ses viviers de recrutement de talents digitaux et en particulier l’augmentation de la présence féminine dans les filières scientifiques et techniques,
– une réflexion sur les codes et processus de l’entreprise,
– la sensibilisation de tout le corps social aux enjeux réels de la diversité et de l’inclusion et à l’impact des stéréotypes dans la création de biais décisionnels.

Un constat étonnant : monde digital ne rime pas avec diversité !

Les récentes révélations sur l’absence de diversité de la force de travail des entreprises emblématiques que sont Google, Facebook, Yahoo et autres LinkedIn constituent une surprise. Malgré une croyance largement partagée qui ferait du monde digital un univers exempt des déterminismes anciens intégrant l’égalité des chances au cœur de son ADN, les salariés de ses entreprises ne reflètent pas la diversité de leurs écosystèmes. L’engagement de Responsabilité Sociale des structures innovantes, aujourd’hui très attendu de leurs clients, impose a minima qu’elles soient volontaristes sur la représentativité de leurs salariés par rapport à leur environnement. C’est pourquoi, longtemps gardées secrètes car politiquement incorrectes dans un environnement états-unien, les données qui viennent d’être publiées ont beaucoup embarrassé les entreprises concernées qui ont promis d’agir. Au-delà de ce dogme qui voudrait que les entreprises reflètent en leur sein les populations des pays dans lesquelles elles opèrent, en évacuant la question de leurs viviers de recrutement et de la compatibilité de ceux-ci avec leurs besoins, des questions se posent sur la performance durable du monde digital tel qu’il s’est construit.

L’innovation : fruit de « l’entre soi » plutôt que de la diversité des profils?

Nous sommes en face de paradoxes. Selon de nombreuses études, la créativité et l’innovation sont censées émerger d’une diversité de profils évoluant dans un environnement épanouissant, comme peut l’être celui de la Sillicon Valley. Chez Orange, cette conviction est, par exemple, partagée par plus de 80% du management français qui fait de la diversité des profils une condition nécessaire de l’innovation. L’analyse de la population des start ups de la Silicon Valley ou des blue chips du monde digital mettent cependant en évidence une forte homogénéité des leurs collaborateurs, ce qui viendrait donc contredire cette conviction. Un autre paradoxe se dessine : dans une étude de juin 2013 sur l’entreprise digitale, l’Orange Labs Research de San Francisco mettait en évidence le fait qu’il était nécessaire pour réussir dans le monde digital de fonctionner en symbiose avec son écosystème de partenaires et de clients. Cette symbiose repose sur une logique de co-construction qui implique de bien comprendre ses partenaires et clients en n’étant pas trop différents d’eux… ce qui ne semble pas être le cas des grands acteurs du monde digital puisque l’ensemble de la population mondiale est potentiellement cliente de leurs applications grand publics. Par ailleurs, dans la même étude, le recrutement et le développement des collaborateurs sont considérés comme des activités essentielles pour l’entreprise digitale. Le président de Google s’y investit ainsi personnellement.
Comment explique-t-on alors que le rapport diversité de Google publié en 2014 sur ses employés états-uniens fasse état d’un taux de féminisation faible (30%) et d’une surreprésentation des « blancs » et surtout des asiatiques ? Noirs et hispaniques ne comptant que pour 5% des effectifs de l’entreprise. Cette anomalie apparait comme encore plus marquée en haut de la pyramide. Google n’est pas le seul à déplorer le phénomène, puisque c’était aussi le cas en 2013 avec la publication des chiffres sur l’origine des employés de Cisco, Intel ou encore Dell, entreprises dans lesquelles les femmes sont encore très faiblement représentées et où les « blancs » détiennent 90% des postes de direction.
L’écrasante majorité des contributeurs du monde digital seraient donc des hommes, jeunes et blancs.
Il suffit pour en être certain de regarder les pionniers, les découvreurs de ces nouveaux horizons : les métiers de l’informatique et du développement d’applications comptent 85% d’hommes… et pas n’importe lesquels !
Dans un récent article du Nouvel Economiste, le monde digital de la Sillicon Valley était aussi épinglé pour son homophobie larvée. Il y est présenté sous l’aspect d’un « club réservé aux hommes » à travers l’exemple anonymisé d’un des plus gros investisseurs de la Sillicon Valley qui, parce qu’il est gay, doit se construire une double vie pour demeurer dans la course du succès. A proximité de la mégapole gay-friendly de San Francisco, cela fait désordre. De la même façon, du fait de la simple question de l’âge de sa population, la représentativité de la société n’est pas assurée dans ce monde digital. Cette spécialisation ethnique, de genre, d’âge n’est pas sans rappeler ce qui se produit dans un système de castes ou de corporations, organisations qui dominaient dans le monde « ancien » et qu’on aurait pensé obsolète dans le monde digital. C’est tout le contraire de la promesse d’un monde ouvert, exempt de discrimination qui contribuerait à créer un futur radieux pour toutes et tous.

Source : Bilans diversité des entreprises compilés par Pixel Envy, juillet 2014
Le monde digital n’est-il peuplé que de clones ?

Le monde digital ne serait-il le territoire que de quelques happy fews, les compétences recherchées pour s’y épanouir ne seraient-elles détenues que par une certaines catégorie d’humanoïdes ? Cet état de fait résulte-t-il d’une analyse établissant que la performance du secteur nécessiterait la sélection de certaines catégories de collaborateurs sur la base de leur origine, leur âge ou leur genre en particulier ? Aurait-on établi que l’homogénéité des profils permettrait d’obtenir un meilleur fonctionnement des équipes et une meilleure réactivité aux évolutions du marché grâce à une compréhension plus intuitive et une meilleure communication entre des gens qui se ressemblent ?
L’explication de cet état de fait réside sans doute plus probablement en amont. Elle serait à rechercher dans l’impact des déterminismes qui nous orientent vers telle ou telle activité : le geek standard est un garçon, il évolue dans un milieu qui valorise l’innovation qui lui permet d’accéder aux nouvelles technologies comme à des matériels de pointe. Il a la chance d’être confronté à ses semblables qui le stimulent, il est donc très probablement issu, à la fois des élites actuelles et des meilleurs cursus mondiaux qui permettent cet écosystème favorable…il est donc par voie de conséquence souvent blanc ou asiatique… puisqu’aux Etats-Unis, seulement 5% des diplômés en sciences de l’informatique sont noirs ou hispaniques. C’est un taux équivalent à celui de leur représentation chez Google. Il semblerait donc que le problème à traiter soit d’abord externe à l’entreprise. La surreprésentation des asiatiques chez les grands noms du digital est aussi intéressante : ils représentent entre 15 et 39% des effectifs des entreprises contre 5% seulement de la population états-unienne. Faut-il y voir une conséquence des stéréotypes très positifs dont bénéficient les asiatiques dans le monde du travail en général et dans celui des nouvelles technologies en particulier ? Ainsi, par exemple, chez Orange en France , 74% des managers ont un stéréotype positif vis-à-vis de cette population dans la sphère professionnelle, c’est la seule population qui bénéficie d’une catégorisation aussi positive.
Les femmes sont aussi plus rares dans les cursus scientifiques qui conduisent aux STEM puisque qu’elles ne représentent que 18% des diplômés en sciences et informatiques aux USA alors qu’elles représentent aujourd’hui près de 70% des diplômés de l’enseignement supérieur du pays. C’est une situation commune à la plupart des pays développés, en particulier en Europe de l’Ouest, comme le met en évidence chaque année l’Etude Mutationnelles dont Orange est sponsor. Elle pointe la faible présence des femmes dans les cursus STEM alors qu’ils offrent des débouchés pérennes et une absence d’écart de rémunération qui serait défavorable aux femmes. Aux Etats-Unis, les femmes qui s’y engagent gagnent en moyenne 33% de plus que celles d’autres professions.
Puisque le secteur devrait, en toute logique, être très attractif pour les femmes, l’explication réside donc bien dans les 2 « S » qui impactent les carrières au féminin et qui sont encore plus marqués dans le monde digital : Sexisme et Stéréotypes. Peu stimulées par leur entourage, les jeunes femmes témoignent d’une appétence moins grande pour la programmation et s’intègrent moins bien dans le mode de fonctionnement des start ups. La porte des entreprises digitales ne leur est pourtant pas complètement fermée puisque, si l’on en juge par les chiffres des rapports diversité, elles sont présentes en grand nombre dans les fonctions non techniques qui ne sont pas « cœur de métier » et où la parité est presque respectée. Le sujet est donc bien à traiter d’abord en amont dans les cursus de formation et lors de l’orientation.

Taux de féminisation des métiers non techniques Taux de féminisation des métiers « techniques »

Source : rapports diversité des entreprises, collectés par Pixel Envy, juillet 2014

Le mode « start up » est le fait d’un fonctionnement de « bande de potes » qui mettent leur vie privée entre parenthèse au service d’une ambition-passion et qui en deviennent souvent des inaptes sociaux, tant ils sont concentrés sur leurs programmes et immergés dans leurs mondes virtuels. Les horaires atypiques des start ups et la connectivité constante qu’implique le fait d’être « à bord » éloignent les jeunes femmes. En effet, dans leurs critères de choix d’une entreprise, elles attachent une importance plus grande que les garçons aux aspects relationnels, à l’échange et elles ont moins de goût pour la compétition ou la programmation en solitaire. Le monde des start ups apparait souvent comme un milieu d’adolescents attardés, sexiste et peu compatible avec une vie de couple ou de famille ni, du fait de son côté « meute», avec une singularité comme peut l’être l’homosexualité.
Les nouvelles technologies sont également « excluantes » plutôt qu’inclusives pour ceux qui ne sont pas des « digital natives », ce qui explique que les start ups comme les valeurs sûres de l’ère digitale n’accueillent que des jeunes dans leurs départements de R&D. Les quelques seniors qui y survivent sont souvent concentrés dans les fonctions supports et non « cœur de métier ». Ils assurent par exemple la connexion pour les aspects financiers avec le « vieux » monde extérieur et ses codes.

L’absence de diversité du monde digital est-elle « politiquement correcte » ?

Ce qui est frappant c’est qu’une mise en évidence de l’homogénéité d’une population de salariés n’est aujourd’hui plus politiquement correcte. La culture sexiste de la Sillicon Valley et de ses équivalents dans le monde suscite désormais des réactions comme celle de Jesse Jackson, militant des droits civiques : « la technologie devrait célébrer l’intégration mais à la place elle perpétue l’exclusion ».
En réaction à l’intérêt médiatique suscité par la publication de son bilan diversité, Google se devait de réagir. Il avait déjà lancé en 2010 un programme de formation de femmes à la programmation doté d’un budget de 40 millions de dollars et communique aujourd’hui largement sur les diversités de toute nature de ses équipes et sur ses « communautés » de salariés. Son site de recrutement constitue désormais une vitrine de toutes les diversités mais elle demeure peu cohérente avec les chiffres publiés récemment. De la même façon, le CEO d’Apple, Tim Cook vient de faire son « coming out » pour montrer combien l’entreprise est ouverte à tous, accueillante : au-delà des questions personnelles qui la motivent, on peut s’interroger devant la mise en scène de cette révélation. Ne s’agirait-il pas d’une forme de contrefeu pour faire oublier les piètres résultats de l’entreprise en matière de diversité ethnique ou de promotion des femmes.

L’absence de diversité n’est-elle pas un risque pour la pérennité du monde digital ?

Bien au-delà des légitimes questions liées au politiquement correct, à la discrimination potentielle, aux déterminismes, se pose une question de pérennité pour le modèle du monde digital.
Deux options semblent envisageables a priori. La première est qu’il « vieillisse doucement » en conservant ses acteurs actuels avec une évolution de ses modes de fonctionnement pour tenir compte des attentes en matière de diversité et de conciliation vie privée-vie professionnelle. Cette hypothèse nécessite de parier sur la capacité de continuer à innover et à rester à la pointe alors que l’on avance en âge. La seconde option est un modèle que l’on pourrait qualifier de « Soleil Vert » qui existe dans certains cabinets de conseils où seule une poignée de dirigeants assure la représentation de la séniorité. Dans ce modèle, l’humain a une date de péremption qui l’oblige à disparaître pour être « recyclé » au bénéfice des générations suivantes.

Cependant, ces deux options reposent sur une croyance en la pérennité du modèle et négligent les risques qui lui sont inhérents.

Son côté endogamique est homogène lui permettrait-il de résister à certaines modifications radicales de son écosystème ? L’absence de remise en question des modèles peut conduire à la chute brutale, la bonne idée se heurter à une meilleure encore. L’absence d’altérité dans la prise de décision et dans la construction d’une vision stratégique ou encore l’absence de prise en compte des signaux faibles du marché sont autant de risques conséquents mis en évidence dans les théorisations de la « diversité ».
Parfois, des bouleversements majeurs se produisent et il faut des profils différents dans une équipe pour faire face à des situations de crise ou tout simplement inédites. Imaginons par exemple une crise énergétique telle qu’Internet, dans sa configuration actuelle, ne trouve plus les moyens de la formidable quantité d’énergie nécessaire à son mode de développement classique ou encore un modèle de régulation qui limite la propriété des données des utilisateurs qui constituent un des actifs essentiels de certains acteurs comme Facebook.

On peut également se poser la question du vieillissement des talents : comment les entreprises digitales vont-elles se renouveler si elles continuent à se limiter à leurs viviers de recrutement actuels ? Les évolutions démographiques rendent le jeune geek blanc plus rare alors que les besoins vont croissant.

D’un point de vue sociétal également on peut se poser la question, plus cruciale encore en période de crise, de la coexistence d’un monde aussi « exclusif » et d’un modèle traditionnel d’entreprises. Le décalage entre les revenus et les perspectives du secteur par rapport au monde classique des services et industries traditionnels risque de créer un clivage insupportable à terme. Comment justifier les valorisations faramineuses de certaines entreprises stars du monde digital alors que le monde classique vit une crise sans précédent. Comment éviter la bipolarisation du monde entre ceux qui sont dedans et ceux qui en sont exclus ? L’absence d’éthique et le comportement de prédation sont souvent une marque de fabrique de ces firmes, du fait du type de profil des créateurs. L’homme jeune, issu d’une élite, n’est pas spontanément porté à la préoccupation sociétale, le geek dans sa bulle est-il à l’écoute du monde ? La Fondation Bill Gates est certes très bien dotée et très active avec une vision un peu « compassionnelle » du monde qui consiste à aider les défavorisés mais quel est l’impact de Microsoft sur son écosystème, comment contribue-t-il au développement en tant qu’entreprise ?
Regardons Apple, ses téléphones fabriqués en Chine dans des conditions souvent pointées du doigt, son absence de préoccupation environnementale dans la conception de ses terminaux, ses marges prohibitives.. Tout ceci ne fonctionne que parce que les consommateurs accordent une préférence à la marque, du fait d’une image et de l’ergonomie qu’elle prête souvent subjectivement à ses produits. Que se passera-t-il le jour où le client lambda, moyennement technophile, se rendra compte que sa marque fétiche ne recrute pas les gens qui lui ressemblent et ne les valorise pas ?

Une plus grande diversité des profils améliorerait-elle la performance ?

De nombreux travaux de recherche ont aujourd’hui établi que l’innovation, quelle qu’elle soit, était stimulée par la diversité des équipes, que la prise de décision était plus judicieuse et la prise de risques mieux contrôlée. Cependant, la performance apportée par la diversité ne se produit que sous condition de l’existence d’un management qui porte un regard positif sur l’altérité et sait la gérer. Des études récentes corroborent cette conclusion majeure qui identifie les conditions qui font que les effets négatifs sur l’efficacité liés à la diversité d’une équipe (mauvaise communication, liens sociaux inférieurs et mauvaise collaboration) sont surpassés par les effets bénéfiques de cette diversité (qualité du processus de prise de décision, capacité de résolution de problèmes plus élevée, créativité et plus grand volume de connaissances disponibles sur les marchés mondiaux de produits). « La sensibilisation à la diversité peut être significativement et positivement associée à la productivité des entreprises. » Chez Orange, entreprise pourtant très engagée sur la promotion de toutes les diversités, 37% des managers considèrent encore que manager des équipes avec des origines diverses génère une « contrainte de management » et 16% que la diversité des origines est potentiellement source de conflits .
La diversité ne rime avec création de valeur que sous condition d’être « accompagnée » et « conscientisée » comme l’établit une méta-analyse à grande échelle portant sur près de 100 travaux de recherche évaluant le succès d’équipes homogènes versus celui d’équipes hétérogènes . Elle aboutit aux conclusions suivantes : toutes les études ayant identifié une création de valeur supplémentaire par des équipes « hétérogènes » mettent en évidence que ce résultat n’a été obtenu que grâce à une sensibilisation des équipes « hétérogènes » à la diversité et à ses effets bénéfiques ou à un renforcement de leurs compétences de travail en transverse. Les équipes homogènes ont de meilleurs résultats si leurs « concurrentes » diverses ont été laissées sans cette in-formation.

Comment rendre la vision diversité compatible avec les enjeux du monde digital ?

Il ne faut pas se tromper de concept lorsque l’on parle de diversité performante : les études montrent aussi, comme celle des universités d’Aarhus et de Lausanne, que « La diversité de la démographie ou l’origine ethnique n’est soit pas associée soit corrélée négativement avec la productivité de l’entreprise.»
Il faut donc relativiser les analyses et reportings de diversités structurelles tel que nous les avons évoqués avec le classement par genre, origine ou âge chez les stars du monde digital. La performance liée à la qualité de la prise de décision et à l’innovation incrémentale procède plus de la diversité fonctionnelle (modes de raisonnement différents) que structurelle. La volonté de favoriser une diversité structurelle ne relève cependant pas uniquement d’une démarche d’équité, elle demeure un levier de la diversité fonctionnelle, du fait des parcours de vie des individus.
Les caractéristiques des collaborateurs ont influencé leur construction personnelle et donc leurs modes de raisonnement. Les femmes, par exemple, du fait de nombreux déterminismes socioculturels, des rôles qui leurs sont assignés dans la sphère familiale, dans la sphère des métiers du « care », de la façon dont elles ont été éduquées.. Constituent la composante qui apporte potentiellement le plus d’altérité dans le mode de raisonnement.
Pour favoriser l’émergence d’une diversité fonctionnelle dans le monde digital, il est important de créer un modèle d’entreprise inclusive attirant de nouveaux talents qui ne frapperaient pas spontanément à sa porte en se disant que « ce monde là » n’est pas fait pour eux. On pense aux femmes en particulier mais c’est le cas de toutes les minorités insuffisamment représentées à l’heure actuelle.
Au-delà du recrutement, il faut encore stimuler et conserver les talents porteurs de cette altérité en leur proposant un environnement inclusif. Faute de celui-ci, la greffe serait un échec et la sous-performance serait au rendez-vous. Ce type d’échec est un classique lors de test de diversification d’une force de travail. Un individu isolé porteur d’une caractéristique nouvelle doit être particulièrement brillant pour résister dans un univers qui est hostile à sa singularité. Une théorie, dite des espèces rares, a été élaborée sur la question en zoomant sur la présence des femmes dans les comités de direction. Un taux de 30% a été identifié comme étant le seuil minimal à atteindre pour que la présence féminine, par l’altérité qu’elle apporte à un comité de direction, puisse produire ses effets et avoir un impact sur les fonctionnements et sur la culture.
Lorsqu’une population pâtit de stéréotypes négatifs dans un environnement de travail, sa performance en est notablement altérée. De très nombreuses études multi-pays ont mis en évidence une sous-performance de plus de 20% lorsque c’est le cas et ce, quel que soit le stéréotype (origine, genre, milieu social, capacités physiques). Le facteur d’explication principal réside dans l’impact de l’anxiété (grâce à l’apport des neurosciences, les nouvelles mesures physiologiques le démontrent dès l’activation des stéréotypes).

Fort de ces différents constats, Orange est volontariste dans la création d’un monde « digital et inclusif », un monde qui innove grâce à l’apport du plus grand nombre dans un environnement respectueux de chacun et qui n’exclut personne. Le credo d’Orange en matière de diversité est que chacun peut contribuer au succès de l’entreprise quand il évolue dans un environnement épanouissant, que la créativité est possible pour tous quand elle est stimulée. Que les stéréotypes attachés à l’âge ou encore à la faible appétence des femmes pour les technologies sont des freins au progrès. Rendre le monde digital plus inclusif c’est aussi stimuler l’engagement des salariés, facteur clé de performance. Ainsi pour la question sensible des seniors en France, pays au monde qui discrimine le plus par l’âge, une étude a mis en évidence que leur motivation, favorisée par un environnement inclusif générait un gain de performance de plus de 40% . Cette nécessité de créer un climat propice pour tous va au-delà des diversités « visibles et évidentes » comme l’âge ou le sexe. Le fait de devoir dissimuler une composante de sa personnalité, comme son homosexualité, sa religion ou un handicap invisible, en environnement hostile, a un effet dévastateur sur l’engagement d’un collaborateur.

Orange acteur digital et inclusif ?

Le challenge à relever est de taille. Aujourd’hui, en matière de féminisation, Orange n’est pas vraiment mieux loti, pour ses activités de recherche de pointe, que les stars du monde digital. La faible féminisation de ses viviers de recrutement de prédilection en est la cause principale : malgré une politique volontariste, les recrutements féminins ne représentaient en France en 2013 que 32% (seulement 12% dans les métiers du réseau). A l’exception de la Chine avec un taux de féminisation record de 49% et de l’entité Recherche en France à 38%, les Orange Labs pâtissent, en particulier, du même déficit féminin que Google.

Le 30% de taux de féminisation global de Google est à comparer au 36% d’Orange. Cependant, avec seulement 20% de femmes parmi son management, Google semble avoir une difficulté plus grande à promouvoir les femmes (chez Orange elles représentent plus de 31% des effectifs des managers). C’est vraiment là qu’Orange fait la différence alors que le bat blesse pour Google et la majorité des autres acteurs du monde digital : par ses actions sur ses fonctionnements de ressources humaines, notamment en matière de détection des talents, des budgets spécifiques et la sensibilisation de son management, Orange a réussi à faire émerger une plus grande proportion de femmes dans ses postes à responsabilités.

Source : rapports diversité des entreprises, collectés par Pixel Envy, juillet 2014

En revanche, il n’est pas certains que les recettes testées par certains grands acteurs du secteur pour attirer les femmes dans l’univers digital et leur permettre d’accéder à des responsabilités importantes se révèlent efficaces ni appréciées du fait de ce qu’elles sous-entendent. La récente annonce d’Apple et de Facebook qui financent la congélation d’ovocytes de leurs salariées pour leur permettre d’accéder à des responsabilités pose de nombreuses questions. Certains y voient une innovation en matière de « package » employeur du fait du coût du dispositif (environ 20 000 dollars US) et une souplesse apportée aux femmes pour leur permettre de s’engager à fond dans leur carrière en gardant leurs chances de maternité pour une phase de leur parcours où elles auront réussi à attendre des strates décisionnaires… et… un âge plus avancé. Sans même parler de l’intrusion dans la sphère privée avec une volonté de réguler voire de planifier les congés maternité, ce que cette approche sous-entend est qu’il y a opposition frontale entre carrière et maternité et qu’avoir un enfant jeune est un frein au succès professionnel pour les femmes. Il s’agit d’une approche qui peut paraître choquante et qui révèle une permanence des modèles sacrificiels d’engagement au travail, comme si la conciliation d’une carrière réussie et d’une vie familiale était impossible pour les femmes, comme si un équilibre de couple ne pouvait être assuré grâce à l’engagement des pères.

Pour la question de l’âge également, la comparaison est en faveur d’Orange qui a démontré que l’on peut être un acteur significatif du monde digital avec une moyenne d’âge de 51 ans pour sa recherche en France.

La conviction d’Orange de ce que la diversité est un facteur de performance pour une entreprise digitale a été mise en évidence dans un « business case » qui passe en revue tous les apports potentiels sur la performance d’une approche inclusive. Impact sur les aspects commerciaux, sur l’engagement des salariés ou encore sur l’image externe.

L’approche d’Orange pour devenir une entreprise « digitale et inclusive » repose sur le traitement de trois dimensions principales :
– La création de viviers de talents digitaux au sein des populations insuffisamment représentées dans ses effectifs,
– Le changement de ses « codes » d’entreprise,
– La sensibilisation de son corps social à l’impact des stéréotypes de différentes natures et aux biais décisionnels qu’ils peuvent générer.

Orange contribue à la diversification des talents digitaux

De façon pragmatique, pour développer les viviers de talents digitaux Orange s’appuie sur des partenaires associatifs ayant fait la preuve de leur efficacité.
Il a aussi créé l’association Capital Filles qui cible les lycéennes des quartiers défavorisés et des zones rurales pour leur présenter les opportunités de carrière dans les métiers scientifiques et techniques et les inciter à y faire carrière, via l’alternance et l’accompagnement de marraines. Le pari est que les STEM permettent plus d’opportunités à ces jeunes filles car elles n’y souffrent pas d’un déficit culturel. Après avoir démontré son impact sur plusieurs milliers de lycéennes en France, le programme est en phase d’internationalisation avec un pilote en Roumanie.
Orange est également le pilote et principal contributeur de Passeport Avenir, démarche sectorielle qui vise à faciliter l’accès de jeunes de milieux modestes aux filières d’excellence grâce au support de tuteurs, cadres d’entreprise. Du fait de son ciblage sur les catégories sociales les plus défavorisées, Passeport accompagne majoritairement des étudiants issus de l’immigration. Ce ciblage répond à l’enjeu de diversification des viviers de talents digitaux qui ne peut être traité spécifiquement dans le contexte français du fait de l’absence de comptage ethnique. La même logique prévaut pour s’ouvrir à des jeunes avec des modes d’apprentissage différents et issus de populations défavorisées dans le cadre du partenariat avec l’Institut Villebon-Georges Charpak qui a la volonté d’intégrer un maximum de filles dans les promotions de l’Institut. L’accompagnement consiste à lutter contre l’autocensure de ces étudiants et à leur donner les codes du succès en entreprise.
Dans le cadre de son partenariat avec Simplon.co qui a pour objectif de former au développement informatique un très large public peu représenté dans le monde digital, Orange cible là encore particulièrement les femmes qui représentent la moitié d’une promotion de Simploniens.
Comme les déterminismes qui éloignent les femmes du monde digital nécessitent de donner très tôt aux filles l’envie de s’engager dans une carrière scientifique et technique, Orange contribue à plusieurs initiatives visant à présenter l’intérêt du monde digital aux plus jeunes et à lutter contre les stéréotypes souvent véhiculés par leur entourage. L’entreprise est ainsi partenaire du Concours Science Factor dans lequel sont en compétition des projets construits par des équipes de lycéens pilotées par des filles. Orange accueille, partout dans le monde, des lycéennes qui suivent durant une journée de travail une marraine exerçant son activité dans une fonction scientifique ou technique. Cette initiative qui a pour nom le « shadowing » fait partie des engagements d’Orange vis-à-vis de la Commission Européenne dans le cadre de sa signature du Code des bonnes pratiques pour promouvoir l’emploi des femmes dans les TIC (Technologies de l’Information et de la Communication).

Orange fait évoluer ses codes d’entreprise pour favoriser la diversité des talents

A la différence de bon nombre d’entreprises états-uniennes, Orange aborde le sujet de la diversité par l’angle de l’inclusion et non du comptage des catégories et du pilotage des communautés. L’entreprise, par ses engagements vis-à-vis de ses collaborateurs, dans ses textes de référence comme le Contrat Social en France ou la People Charter, rappelle qu’elle proscrit toute forme de discrimination et qu’elle s’attache à offrir à chacun de ses collaborateurs un environnement épanouissant professionnellement. L’objectif d’Orange est de faire en sorte que, lors de toutes les décisions managériales ou de gestion des ressources humaines, seuls soient pris en considération des éléments d’évaluation que sont la performance, le potentiel, la motivation. Ceci tout au long de la carrière, du recrutement au départ de l’entreprise. Il faut pour cela s’attacher à l’individu et s’extraire des éléments parasitant le jugement comme le genre, l’âge, le diplôme, l’origine ou encore tout autre critère pouvant affecter une décision managériale de recrutement, de promotion ou de rétribution. A cet effet, Orange a revisité ses processus de ressources humaines au fil du temps pour éliminer des critères comme la notion d’âge dans la détection des hauts potentiels. Mode de fonctionnement qui était particulièrement défavorable aux femmes dans la période de la maternité. Comme nous l’avons évoqué précédemment, les résultats en sont visibles dans le taux de féminisation de l’encadrement qui place Orange au dessus de ses référents digitaux.

Le modèle de management d’Orange intègre aujourd’hui, parmi ses huit dimensions, la « capacité à manager les diversités ». Ce critère valorise les managers qui ont une vision positive du sujet et qui, par ce faire, contribuent à la performance d’Orange. Il sert à évaluer les managers et à en recruter.
Afin de rappeler symboliquement l’importance attachée à la féminisation des échelons supérieurs de l’entreprise, l’évolution du taux de féminisation de ceux-ci est un des indicateurs impactant le calcul de la part variable des dirigeants.

Orange a encore des défis à relever pour faire émerger plus de diversité au service de sa performance

Orange a déjà construit les fondamentaux d’une culture de l’inclusion pour ses salariés en travaillant sur ses codes et ses processus de ressources humaines. Dans un contexte où certaines populations sont insuffisamment représentées dans les formations qui permettent une intégration dans le monde digital, Orange doit encore améliorer son image d’employeur inclusif pour attirer la plus forte proportion de talents. C’est en particulier le cas des femmes dans les métiers scientifiques et techniques.

Il reste encore à partager plus largement les convictions des dirigeants sur le lien entre diversité et performance afin que l’ensemble du corps social en comprenne les enjeux et participe au déploiement de cette stratégie. C’est l’objet, en particulier, d’un module de formation dispensé par l’université des managers du Groupe, Campus.

Par ailleurs, l’entreprise procède à des introspections régulières de son climat d’inclusion avec son baromètre des diversités avec des études ad hoc sur les relations femmes-hommes dans l’entreprise ou encore sur les stéréotypes liés aux origines. Les restitutions des conclusions de ces évaluations sont partagées très largement et en toute transparence, notamment avec les organisations syndicales. C’est une mise à plat des difficultés résiduelles de perception qui permettent d’identifier les priorités pour favoriser l’inclusion.
A titre d’exemple, en 2013, la prise en compte de la sensibilité du sujet de l’orientation sexuelle pour laquelle le climat chez Orange apparait notablement moins inclusif que la moyenne française a conduit l’entreprise à participer à des initiatives visant à améliorer le niveau d’inclusion sur cette question précise.
La perception de la priorité à accorder à l’égalité professionnelle entre femmes et hommes a mis en évidence des disparités fortes entre managers femmes et hommes : les hommes , dans une proportion encore plus forte qu’il y a 3 ans, pensent que, du fait du volontarisme d’Orange, l’égalité professionnelle est désormais une réalité et qu’elle ne doit donc plus constituer une priorité. De la même façon, les hommes ne perçoivent pas ce que les femmes caractérisent comme un climat encore empreint de sexisme qui nuit à leur performance. En 2013, 52% des femmes d’Orange se disaient encore « très affectées » par des comportements sexistes et 36% , du fait d’une forme d’autocensure, ont déjà renoncé à des évolutions (postes, promotions, missions, formations) parce qu’elles étaient des femmes, en se disant que le jeu n’en valait pas la chandelle.

Au-delà de la question des stéréotypes et des biais décisionnels qu’ils induisent, Orange a entrepris une vaste campagne de formation et d’acculturation de ses salariés pour démystifier le monde digital, Orange Digital Leadership Inside, et permettre à chacun-e de s’y investir en en comprenant les ressorts. L’objectif est d’éviter l’exclusion de ceux qui ont moins de facilité à s’y engager et favoriser l’émergence d’une culture globale de l’innovation. C’est un moyen, en particulier, d’éviter le clivage par l’âge.

En conclusion

A la différence des acteurs états-uniens du monde digital qui comptabilisent les « catégories » de salariés, Orange a développé une vision de l’inclusion de toutes et de tous qui va bien au-delà du comptage des seules diversités visibles, ceci uniquement dans une optique de « représentation catégorielle ». Il s’agit de permettre à chacun d’être le plus efficace possible dans son collectif de travail parce qu’il se sent valorisé dans sa singularité sans être réduit à celle-ci.

Orange a acquis la conviction que la diversité des profils de ses collaborateurs est un facteur de performance et se montre très volontariste pour améliorer celle-ci, notamment en matière de présence féminine dans ses métiers techniques. Cependant, l’aspect le plus important pour la performance à travers l’innovation, la prise de décision éclairée ou encore la gestion des risques est d’avoir une complémentarité de points de vue et de modes de raisonnement dans un climat où ils peuvent s’exprimer. Il s’agit donc d’abord de favoriser une diversité « fonctionnelle» obtenue grâce à des collaborateurs ayant des parcours de vie différents. La diversité structurelle qui focalise l’attention de beaucoup d’acteurs ne constitue qu’un des moyens d’atteindre cette performance supérieure qu’apporte la diversité fonctionnelle dans un climat inclusif. C’est ainsi que la présence féminine dans les métiers techniques ou dans les comités de direction est source de performance du fait des parcours de vie différents de la plupart des femmes et non de fait de caractéristiques qui seraient propres aux femmes.

Pour agir sur la création de ce climat d’inclusion et favoriser la diversité au service de sa performance, Orange travaille sur trois principaux axes :
– la diversification des viviers au sein desquels il recrute en faisant également évoluer ses méthodes de recrutement,
– l’évolution des codes de l’entreprise pour la rendre encore plus inclusive,
– la sensibilisation de tout son corps social aux enjeux réels de la diversité et de l’inclusion et à l’impact des stéréotypes sur les biais décisionnels.

D’autres pistes pourront être étudiées sur certaines faiblesses identifiées chez Orange comme l’ouverture plus grande à des diplômés de formation différentes de celles où le groupe recrute traditionnellement sans doute en faisant évoluer ses modes de recrutement. Des benchmarks de pratiques innovantes du marché sont en cours comme avec Keyrus qui a mis en place du « speed recruiting » ou avec Alcatel Lucent où la part variable des membres du top 300 dépend de la diversité des recrutements de leur périmètre de responsabilités.